[J’ai profité d’une période de confinement mondial pour mettre mon corps en jachère.
Afin de ne pas sombrer dans une abstinence solennelle, j’irai cueillir quelques épiques récits sur la vie libidinale des autres]
Notre époque croule sous les images qui témoignent de la vie des gens. Nous sommes assoiffés de partage. Regarde mes vacances, regarde ce que je mange, ce que je bois, regarde mon chat, mon bébé, regarde mon nombril et mes pieds.
Et le sexe dans tout ça ? Exacerbé en pornographie, censuré sur les réseaux sociaux et souvent tabou dans les conversations.
Pourtant, tout le monde y pense, en parle ou bien le pratique.
Le sexe est le plus illogique des besoins. C’est Björk qui l’a dit.
En quelques générations, nous sommes passés du manuel de la bonne ménagère qui enseignait aux femmes comment bien s’occuper de son mari et de son foyer, à un temps de télé-réalité qui réinvente entièrement l’image du couple. La jeunesse semble tiraillée entre une sexualité puritaine et pornographique trash. Nous sommes tous un peu perdus dans le champ des possibles.
C’est pourquoi aujourd’hui, je souhaite mettre ce mot à l’honneur.
[SEXE]
J’ai envie de redorer son image, d’inventer les couleurs de son drapeau et de le hisser fièrement sur la montagne du plaisir.
Pour ce faire, j’ai besoin de vérité, d’authenticité et d’humanité.
J’ai donc fait appel aux autres et à leurs aventures.
Durant un an et quelques mois, j’ai été à la rencontre de 25 personnes rencontrées au hasard de la vie afin de réaliser un entretien. Le but de l’entrevue était de partager sa vision du sexe et de me raconter une histoire personnelle et intime.
Je n’étais pas forcement en chasse de l’anecdote la plus abracadabrante du monde.
Que l’histoire « de cul » ait été croustillante, romantique, absurde, scandaleuse, rigolote ou même absente, le principal était de la partager avec sincérité et légèreté.
Toujours accompagnée de mon petit carnet, j’ai pris le rôle d’une journaliste reporter.
Rien de mieux que d’aller sur le terrain pour prendre note de la réalité.
Une fois de retour dans mon atelier, l’imaginaire prenait place afin d’illustrer (par le dessin et par l’écrit) les propos du participant.
L’ensemble de ce travail m’a permis de créer un livre de contes avérés où les personnes rencontrées
deviennent les héros.
La sexualité à l’honneur, j’ai tenté d’inventer les lignes de l’amour, une sorte de Kamasutra contemporain plein d’originalité, basé sur des histoires vraies.
Un recueil où la sexualité occupe tout l’espace, cabriole de page en page, se blottit dans la pénombre
et jaillit à l’aube matinale.
Milo Manara nous dit que ce n’est pas le dessinateur qui choisit l’érotisme… mais l’érotisme qui choisit le dessinateur.
Je ne suis là en aucun cas pour juger, comparer ou afficher. C’est plutôt une collaboration basée sur le respect et le partage de l’érotisme, un sujet qui m’intrigue et me passionne.
Et vous, quelle est votre histoire ?